
Créer ou développer son entreprise en rejoignant un réseau : une décision stratégique qui ne s’improvise pas.
Rejoindre un réseau : franchise, licence ou commerce associé ?

Publié le 17.06.2025
Temps de lecture : 15 minutes
Plusieurs options pour faire du commerce en réseau
Lorsque l’on crée une entreprise – ou si l’on souhaite la faire évoluer – on peut s’interroger sur l’intérêt de rejoindre un réseau d'indépendants. Ce type de commerce présente les avantages du collectif, mais permet de garder une certaine indépendance juridique et financière. Présentation des différentes formes de mutualisation possibles.
L’option participative : le commerce associé
Le commerce associé désigne un groupement d'entreprises, liées par un intérêt économique de gestion des coûts de postes clés (achats, transports, communication…). Il se décline sous deux structures possibles : la coopérative ou le GIE (Groupement d’intérêt économique). Les participants sont directement impliqués dans les processus de décision. Ils mutualisent leurs moyens tout en gardant une grande liberté. La contrepartie : y consacrer du temps et avoir souvent des délais de décision plus longs.
L’option encadrée : la franchise
La franchise repose sur un contrat par lequel un franchiseur donne le droit à un franchisé d’utiliser sa marque, son concept et son savoir-faire. Le franchisé verse un droit d’entrée et des redevances. Il bénéficie ainsi, au minimum, d’une enseigne et d’une stratégie commerciale communes et également d’un support (formation, assistance…) pour s’approprier le savoir-faire. Cette option offre une sécurité à l’entrepreneur, en lui donnant toutes les clés pour démarrer rapidement avec la notoriété et la compétence de la franchise. Cela induit néanmoins un coût financier non-négligeable et une rigidité pour certains choix futurs.
Des options alternatives
Si vous ne voulez pas aller jusqu’à la franchise – qui est une forme de mutualisation très engageante – trois autres possibilités existent.
- La licence de marque repose sur un droit d’utilisation de la marque uniquement. Cela permet au licencié de bénéficier, en échange d’une contrepartie financière, de la notoriété d’une marque, sans avoir à la construire, tout en conservant une liberté d’action plus grande qu’en franchise.
- La concession exclusive s’appuie sur un droit de distribution des produits pour une durée et un territoire déterminés. Elle est assortie d’une exclusivité d’approvisionnement. Ce format protège de la concurrence, mais il reste limité dans le temps et ne permet pas une visibilité sur le long terme.
- La commission-affiliation donne un droit de vente de produits qui restent la propriété du concédant. L’entreprise affiliée va percevoir des commissions sur les ventes. Les stocks n’étant pas achetés, les risques sont limités, mais cela rend aussi dépendant des approvisionnements.
La propriété intellectuelle, pilier stratégique des franchises
Dans un environnement économique où la concurrence est de plus en plus intense, la propriété intellectuelle assure la sécurité, la pérennité et le succès du modèle de la franchise. Explications.
La propriété intellectuelle concerne un ensemble d’éléments immatériels, comme les marques, les logos, les brevets et les savoir-faire. Ils permettent de définir l’identité unique de la franchise et d’assurer sa cohérence. En transmettant ces éléments clés au franchisé, la propriété intellectuelle contribue à structurer le modèle économique du réseau et garantit l'homogénéité de l’offre, essentielle pour fidéliser la clientèle.
La marque : un élément identitaire à préserver
Au cœur de cette propriété intellectuelle, la marque occupe une place prédominante en tant qu'élément visible et reconnaissable. Elle se compose de signes distinctifs comme le nom, le logo ou le slogan, qui différencient instantanément les produits ou services de ceux de la concurrence. Le franchiseur, détenteur des droits exclusifs de cette marque, en cède l’utilisation au franchisé par le biais du contrat de franchise. Le franchisé bénéficie ainsi de la notoriété d’une marque déjà bien implantée et reconnue par le public, mais il doit respecter un usage strictement encadré afin de préserver la cohérence de l’image de marque. La protection de cette marque, par des dépôts officiels auprès d’organismes comme l’INPI (Institut National de la Propriété Industrielle), garantit l’intégrité et la sécurité juridique de son exploitation, essentielle pour l’ensemble des membres du réseau.
Protéger le savoir-faire opérationnel
L'identité d'une franchise ne repose pas exclusivement sur la visibilité offerte par la marque ; elle s’appuie aussi sur des pratiques et des savoir-faire qui en sont le moteur opérationnel. Le savoir-faire acquis par le franchiseur regroupe des méthodes de travail, des techniques commerciales et des procédés spécifiques qui assurent la réussite de l’exploitation. Lors de la signature du contrat, le franchiseur transmet ce savoir-faire au franchisé à travers des formations, des manuels opératoires et un accompagnement rigoureux. Ce transfert de connaissances participe non seulement à la performance de chaque unité franchisée, mais aussi à l’uniformité de l’expérience client dans l’ensemble du réseau. Pour en assurer la confidentialité et la protection, des clauses sont souvent incluses dans le contrat, engageant le franchisé à ne pas divulguer ce savoir-faire, même après la fin du contrat.
Innovations et brevets pour mieux se différencier
Dans certains secteurs, la franchise s’appuie sur des innovations techniques brevetées qui renforcent son avantage concurrentiel. Qu’il s’agisse de procédés de fabrication, de formules exclusives ou de concepts brevetés, ces innovations confèrent à la franchise une position unique sur le marché. Le franchisé bénéficie de cet accès privilégié aux dernières avancées techniques ou aux produits innovants, lui permettant de se démarquer face à la concurrence. La protection de ces innovations par des brevets garantit que seul le réseau peut les exploiter, sécurisant ainsi le franchisé contre d’éventuelles copies ou pratiques de contrefaçon.
Contrôle et intégrité du réseau
La propriété intellectuelle accorde au franchiseur un pouvoir de contrôle essentiel pour préserver l’intégrité du réseau. En maintenant des droits exclusifs sur la marque, le savoir-faire et les innovations, le franchiseur est en mesure de s’assurer que chaque franchisé respecte les standards de qualité et les normes définies pour le réseau. Ce contrôle peut être exercé par le biais d’audits, de formations continues ou d'inspections. Et en cas de non-respect ou d'atteinte à la propriété intellectuelle, le franchiseur a la responsabilité de prendre des mesures pour protéger l'image de marque et les intérêts du réseau. En somme, la propriété intellectuelle dans une franchise est bien plus qu’un ensemble de droits : elle constitue un actif stratégique et un levier de croissance. Pour le franchiseur, elle représente un moyen de structurer et de protéger le réseau, tandis que pour le franchisé, elle garantit une marque forte, un savoir-faire éprouvé et une innovation continue.
Franchise : se poser les bonnes questions avant de se lancer
La franchise est attrayante pour les entrepreneurs en quête de développement rapide. En rejoignant un réseau établi, ils bénéficient d'une notoriété, d'une formation et d'un soutien logistique. Cependant, ces avantages ne sont pas sans contrepartie.
Réseau préexistant, image de marque, clientèle acquise… la franchise a plus d’un atout. Plus le réseau est important, plus ses actions commerciales et publicitaires sont visibles. Le franchiseur vous assure d’être le seul représentant de l’enseigne sur votre territoire. Vous bénéficiez d’un accompagnement avec des outils et des formations favorisant une montée en compétence rapide sur les produits, les techniques de vente et la gestion de la franchise. La gamme de produits est organisée et gérée par le franchiseur, qui met en place des achats groupés avec des tarifs préférentiels.
Des avantages et des contreparties
Mais les services du franchiseur ne sont pas sans contrepartie. Le franchisé doit s’acquitter d’un droit d’entrée et verser une redevance annuelle impactant plus ou moins la rentabilité de l’entreprise. À cela s’ajoutent les conditions d’implantation du magasin qui pèseront sur le montant du pas-de-porte, du droit au bail ou du loyer. Les aménagements obligatoires pour mettre en valeur les produits de la franchise sont également coûteux.
Il est important de connaître le délai de renouvellement de ces aménagements. Le franchisé doit respecter les normes d’exploitation, la charte graphique de l’enseigne, les obligations de référencement des produits et former son personnel aux normes édictées.
Le franchiseur joue aussi le rôle de « plateforme d’achat » : vous allez commercialiser ses produits, et les volumes l’intéressent fortement. Attardez-vous sur les clauses d’approvisionnement : devez-vous commander tous les produits ou pouvez- vous sélectionner certains d’entre eux ?
Prendre le temps d’une étude approfondie
Avant de s’engager, il est essentiel de mener une réflexion approfondie sur les différents aspects de la franchise. Par exemple, la durée du contrat de franchise doit être assez longue pour permettre au franchisé « d’amortir » son investissement. Si le contrat ne prévoit pas de clause de tacite reconduction, vous n’aurez pas un droit à renouvellement automatique à son expiration. En cas de non-renouvellement par le franchiseur, vous ne percevrez aucune indemnité. Par ailleurs, votre personnel doit être formé et capable de mettre en valeur l’enseigne.
Le contrat de franchise peut aller jusqu’à définir un nombre de salariés en fonction de la surface de vente et celui-ci ne correspondra pas forcément à votre activité réelle. Il est aussi essentiel de s’intéresser au professionnalisme de la franchise et à sa solidité financière. Les moyens financiers et humains sont-ils suffisants pour supporter le développement du réseau ? L’assistance est-elle au rendez-vous ? Ses fournisseurs sont-ils capables de suivre en volume et en rythme ? La qualité des produits est-elle constante ? Les délais de livraison sont-ils respectés ? Pour obtenir des réponses, n’hésitez pas à rencontrer d’autres franchisés du réseau en participant, par exemple, à des salons spécialisés.
Pourquoi et comment sortir d'une franchise ?
Les contrats de franchise sont conclus pour des périodes variant entre 3 et 10 ans, avec parfois une tacite reconduction. Pour différentes raisons, vous pouvez souhaiter sortir de cette franchise avant la fin du contrat. Mais attention, les conséquences d’une sortie anticipée ne sont pas à prendre à la légère.
Non-respect d’un contrat spécifiant une exclusivité territoriale, fourniture d’outils de gestion ou de communication non effective, inexistence de formations promises… Les motifs qui peuvent pousser le franchisé à demander une sortie de la franchise sont variés. Si le franchiseur ne respecte pas ses engagements, le franchisé peut dénoncer son contrat, voire contraindre le franchiseur à lui verser des indemnités compensatoires.
Mais attention, les promesses orales ne seront pas valables et ne justifieront pas une sortie. Si ce sont des difficultés financières, par exemple une impossibilité de payer les redevances qui motivent une sortie anticipée de la franchise, dans ce cas, ce sera aux torts du franchisé. De la même manière, si le franchisé a le sentiment que la franchise ne lui apporte pas les avantages estimés (par exemple, si les objectifs de vente ne sont pas atteints ou si le cadre est devenu trop contraignant pour développer des projets), il sera, là aussi, responsable de la sortie. Il faudra alors bien mesurer les avantages et les inconvénients de cette décision.
Quelles modalités de rupture du contrat ?
En théorie, la rupture à l’amiable – avec la mise en place d’un compromis de sortie – est la solution la plus simple et la plus efficace. Mais dans la pratique, cette option est très rarement acceptée, puisque la demande de rupture est souvent unilatéralement souhaitée par le franchisé. Si la rupture à l’amiable n’est pas envisageable, il faudra reprendre les éléments du contrat signé et vérifier qu’il existe bien une clause de sortie anticipée. Si cette disposition n’existe pas, alors le franchisé doit théoriquement respecter son contrat jusqu’au bout, sauf s’il justifie du non-respect des engagements du franchiseur.
Le recours à un spécialiste sera utile pour lire de façon efficiente le contrat et engager une procédure. Dans certains cas, pour des raisons financières, il sera peut-être plus pertinent d’attendre l’échéance du contrat. Faites attention au délai prévu pour informer de la sortie, car les contrats sont généralement conclus avec une clause de tacite reconduction. Examinez également les clauses de non-concurrence qui pourraient bloquer de futurs projets. En conclusion, soyez très vigilant à la signature de votre contrat de franchise, puisque c’est lui qui déterminera votre cadre réglementaire et votre capacité à sortir sereinement de la franchise.
Copyright © Magazine « Gérer pour gagner » ACS n°74 - Févr. Mars Avril 2025
Rédacteurs : Anaïs Troton, conseillère d'entreprise ; Aline Thopart, fiscaliste et Nicolas Beaudic, consultant
Éditeur : Conseil National du Réseau Cerfrance Association loi 1901 - Siège social : 18 rue de l’Armorique 75015 Paris - Tél. 01 56 54 28 28