Réussir sa cessation d'activité : le guide complet
Publié le 29.11.2024
Le point sur les différentes formes d’arrêt d’activité
Qu'il soit contraint ou volontaire, l'arrêt d'activité nécessite anticipation et organisation. Tour d’horizon des différentes formes d’arrêt d’activité possibles :
La cession d'activité (transmission à titre onéreux)
L’objectif est établi : vous souhaitez vendre votre activité à un repreneur. Le transfert de l’activité peut être partiel ou total et est réalisé en contrepartie du versement du prix de cession. Vous pouvez opter pour la cession de votre fonds de commerce ou des titres de votre société. Vous devrez réaliser un diagnostic de votre entreprise et une étude précise de ces deux opportunités pour faire votre choix. Au-delà des aspects juridiques, les impacts fiscaux influenceront votre décision.
La donation (transmission à titre gratuit)
Vous envisagez la transmission à titre gratuit de votre entreprise à un membre de votre famille ou à un salarié ? La question de la donation est souvent évoquée. Si celle-ci est très avantageuse, elle nécessite cependant de la préparation pour déterminer la meilleure option : donation simple (les biens seront réévalués au jour du décès) ou donation-partage (la valeur est figée au jour de la donation). Si elle a des avantages, la transmission à titre gratuit est fiscalisée au-delà de certains seuils. Lors d’une donation, vous pouvez néanmoins bénéficier d’un avantage fiscal : le pacte Dutreil. Assorti de conditions, il permet de bénéficier d’un abattement de 75 % sur la valeur des titres transmis.
La cessation volontaire (dissolution)
La cessation, qu'elle relève du choix du chef d'entreprise ou du fait que l'entreprise ne dispose plus de trésorerie suffisante pour régler ses dettes, nécessite des démarches auprès de l’administration qui varient selon la forme juridique de votre société. La première étape consiste à arrêter l’activité. Vous avez alors un délai de 30 jours pour déclarer l’arrêt sur le Guichet unique des formalités d’entreprise. Cette déclaration ne soustrait pas l’entreprise au paiement des cotisations et impôts et à la publication d’une annonce légale. La dissolution volontaire concerne uniquement les entreprises qui ne sont pas en cessation de paiement.
La liquidation judiciaire (arrêt involontaire)
La liquidation met fin à l’activité de l’entreprise en état de cessation de paiements et dont le rétablissement est manifestement impossible. On parle alors de liquidation judiciaire. Elle peut être demandée par l’entrepreneur individuel ou le dirigeant (pour une société) dans les 45 jours qui suivent la constatation de l’état de cessation de paiement. Le tribunal nomme ensuite un liquidateur qui se charge de la gestion de l’entreprise, de la vérification des créances, de la vente des biens, du licenciement des salariés, des salaires et du recouvrement des sommes dues à l’entreprise.
La gestion stratégique et opérationnelle de la cessation d’activité
Plusieurs facteurs peuvent être à l’origine d’une cessation d’activité : une baisse significative des performances, une volonté délibérée de s'orienter vers de nouvelles opportunités ou encore la perspective d’une retraite bien méritée. Quoi qu’il en soit, le chef d’entreprise devra faire preuve d’anticipation et d'une organisation méthodique.
Anticipation et gestion stratégique
Lorsqu’elle a été choisie et anticipée par le chef d’entreprise (par exemple dans le cas d’un départ à la retraite ou d’un changement d’horizon professionnel), la cessation d'activité doit faire l'objet d'une préparation. L'idéal est de se faire accompagner au moins deux ans avant la date prévue de la cessation. Si elle est précipitée (par exemple en cas de mauvais résultats ou d’aléas), il faut alors créer son plan d’action sans attendre.
Un plan d'action clair et une organisation rigoureuse
Une organisation rigoureuse est la clé du succès. Cela implique la création d'un plan d'action clair et détaillé, définissant les étapes à suivre, les responsabilités des différentes parties prenantes et les échéanciers à respecter. Pour ce faire, vous pouvez utiliser un outil de planification. C’est une aide précieuse pour s’organiser efficacement. La première étape consistera à dresser une liste exhaustive de toutes les tâches nécessaires à la cessation d'activité.
Une fois les tâches identifiées, il est essentiel d'estimer la durée de chacune pour planifier efficacement l'ensemble du processus et convenir d’échéances réalistes. Il faut également clarifier les responsabilités de chacun et s'assurer que chaque tâche est assignée à la bonne personne. Une fois que le processus de cessation d'activité est en cours, l’outil de gestion permet de suivre l'avancement du projet en temps réel. Les barres de progression indiquent visuellement quelles tâches sont en cours, terminées ou en retard, ce qui permet, en cas de besoin, de prendre des mesures correctives et de cesser son activité sereinement.
Les différents volets de la cessation d’activité :
- Acter juridiquement la cessation d'activité : une fois la décision de cessation prise, elle devra être formellement entérinée, généralement lors d'une assemblée générale extraordinaire. Cette décision est consignée dans un procès-verbal précisant les raisons de la cessation d'activité et la date effective. Le chef d'entreprise doit notifier ses créanciers et veiller au règlement des dettes et des obligations fiscales et sociales. La cessation d'activité entraîne également la liquidation des actifs, qui peut se faire de manière amiable ou sous contrôle judiciaire. Simultanément, le chef d'entreprise doit informer les organismes publics de la cessation d'activité. Les démarches varient en fonction de la situation : changement d'objet social, mise en sommeil, dissolution ou liquidation de la société. Ces formalités doivent être effectuées via le site de l'INPI*, et elles seront transmises aux autres organismes (Urssaf, SIE**, etc.). Enfin, une publication dans un journal d'annonces légales est souvent requise pour informer les tiers et officialiser la fin de l'activité de l'entreprise. Ces étapes permettent de clore juridiquement l'existence de l'entreprise tout en respectant les droits des parties prenantes et les prescriptions légales.* Institut national de la propriété industrielle. ** Service des impôts des entreprises.
- La gestion des salariés : le chef d'entreprise est tenu de notifier à ses salariés la cessation d'activité. Cela peut inclure des consultations avec les représentants du personnel et la mise en place de mesures d'accompagnement pour les employés. Il faudra rompre les contrats de travail dans le respect de la législation sociale et calculer le coût des indemnités à verser aux salariés. Il est essentiel de budgétiser cet aspect.
- Étudier les impacts fiscaux : un juriste fiscaliste pourra accompagner le chef d'entreprise dans ses démarches, chiffrer l'éventuelle imposition résultant d'une vente et appliquer des exonérations de plus-values lorsque les conditions sont remplies.
- Dénoncer les contrats conclus : tout au long de sa vie, l'entreprise contracte avec de nombreuses entités. Il faudra les lister et les informer de la situation. Il s'agit souvent du propriétaire bailleur des locaux avec qui le contrat de location devra être résilié, en appliquant le délai de préavis prévu. Il y a également les fournisseurs et clients réguliers à prévenir, ainsi que les comptes bancaires à clôturer.
- Établir le bilan comptable de cessation et deliquidation
Optimiser la transmission de sa société
Céder ou donner les titres de votre société sont des étapes clés de votre parcours d’entrepreneur, optimisables économiquement et fiscalement ! Bonne nouvelle pour vous, l’administration fiscale prévoit certaines modalités pour faciliter ce type d’opération. Mais attention, elle surveille tout cela de très près et impose des conditions assez restrictives.
Dans la jungle des dispositifs fiscaux applicables (151 septies, 238 quindecies, 151 nonies I, II, III et IV et consorts…), arrêtons-nous sur l’article 150-0 B ter du Code général des impôts qui prévoit – sous certaines conditions – un dispositif de report d’imposition en cas d’apport à une holding contrôlée. Sur le papier, le dispositif est d’une grande limpidité : j’apporte les titres de ma société (qui devient une filiale) à une autre société que je contrôle (la fameuse holding).
Si cette action génère une plus-value sur les titres apportés et que cette plus-value est mise en report d’imposition : pas de fiscalité, pas de problème ! Mais dans les faits, ça se complique un peu… L’étape suivante – l’arrêt de l’activité – se profile à l’horizon. Selon le choix retenu, le sort de la plus-value en report sera bien différent.
Mais l’histoire ne s’arrête pas forcément avec l’arrêt de l’activité. En effet, lorsque le report est maintenu, une prochaine opération pourrait à nouveau entraîner la fiscalisation de cette plus-value. Seule la donation des titres de la holding (ou le décès de l’apporteur) met véritablement fin au report d’imposition.
Anticiper pour mieux valoriser
S’il n’est pas aisé d’anticiper la cession de son entreprise, il est essentiel d’effectuer un travail préparatoire pour réduire au maximum les facteurs d’incertitude. Comment se projeter dans la cession bien en amont ? Quelles sont les clés d’une bonne préparation pour tirer le meilleur parti de la cession ?
Bon nombre de dirigeants d’entreprise se posent la question de leur capacité à valoriser un actif professionnel. Lorsqu’on a repris ou reçu en héritage une entreprise (fonds de commerce ou parts sociales de société), la mesure de l’évolution du chiffre d’affaires ou de la rentabilité est relativement facile. Mais lorsque le dirigeant a créé son entreprise, la démarche de valorisation peut être plus nébuleuse. Dans les deux cas, les caractéristiques intrinsèques de l’entreprise, c’est-à dire son organisation, son ou ses dirigeants, ses salariés, son savoir-faire ou encore ses installations, font partie intégrante de sa valeur. S'y ajoutent d’autres éléments qui influenceront la valorisation de l’entreprise de manière directe et indirecte.
Ce diagnostic est traditionnellement réalisé dans le cadre d’une évaluation d’entreprise « classique » afin de justifier le choix des coefficients appliqués dans les calculs de valorisation. Il porte sur la rentabilité passée et actuelle de la structure, mais aussi sur l’état du marché dans lequel évolue l’entreprise, ou encore sur l’évolution de sa clientèle. L’idée est, en quelque sorte, de dupliquer ce travail de diagnostic sous une forme prospective. Dans un premier temps, il s’agit d’analyser les tendances, les réglementations et les évolutions de consommation. Ensuite, il faut positionner l’entreprise face à ces facteurs d’évolution. C’est, en grande partie, la capacité de l’entreprise à s’adapter au contexte qui va déterminer si, oui ou non, elle maintiendra, voire augmentera sa valeur dans un futur plus ou moins proche.
Pour illustrer ce propos, prenons l’exemple d’un plombier chauffagiste qui a une activité principale de pose de chaudières à gaz, et une activité secondaire d’entretien de celles-ci. Le durcissement de la réglementation (la réglementation environnementale RE2020 interdit ce type de chaudières dans les logements neufs), mais aussi l’augmentation du coût des énergies fossiles, sont autant de signaux négatifs traduisant les tendances d’activité sur ce marché. En fonction de l’analyse de sa clientèle, mais aussi du nombre d’années qui le sépare de son arrêt d’activité, plusieurs choix s’offrent à lui. Le plombier chauffagiste peut simplement décider de développer significativement son activité d’entretien de chaudières, car son fichier de clients récurrents gagnera en valeur (vs une clientèle aléatoire de SAV de pose de chaudière). Il peut aussi envisager de développer une activité de pose et d’entretien de pompes à chaleur soutenues par les aides à la rénovation.
Dans le contexte actuel d’instabilité économique, il est difficile de présager de la valorisation future d’une entreprise. Toutefois, si elle est bien orientée vers les défis de son marché et les attentes de ses clients, il sera plus aisé de penser son projet de cession d’activité à 5 ou 10 ans.
Copyright © Magazine « Gérer pour gagner » ACS n°72 - Août Sept Oct. 2024
Rédacteurs : Elodie Boutbien, responsable de marché ; Aline Thopart, fiscaliste ; Nicolas Cayzeele, conseiller en patrimoine ; Régis Campion, responsable veille et innovation
Éditeur : Conseil National du Réseau Cerfrance Association loi 1901 - Siège social : 18 rue de l’Armorique 75015 Paris - Tél. 01 56 54 28 28